C.G. Jung décrit l’existence d’une dynamique de transformation, la mise en oeuvre de la confrontation du moi avec le processus de métamorphose, induit par la libération et le surgissement des contenus de l’inconscient. Le processus de transformation alchimique se juxtapose pour lui au processus d’Individuation. Dans l’optique analytique, la matière première est contenue dans le fondement de l’inconscient collectif et les irruptions de celui-ci par l’intermédiaire de l’inconscient personnel. Cette matière brute se tient également dans tous les couples d’opposés. Bien qu’étant antinomiques, ces symboles composent et participent à la phénoménologie du Soi qui incarne la totalité de la psyché ainsi que son but. Pour cette alchimie de la psyché, il s’agit également d’une aventure de l’esprit en contact permanent avec une exploration de la matière, qui se révèle par des manifestations du corps. Pour se réaliser, le Grand Oeuvre doit aboutir à l’unité et créer la Pierre Philosophale, qui se trouve en liaison avec la perfection que doit atteindre le philosophe en matérialisant l’esprit et en spiritualisant la matière. La transmutation psychique du moi vers le Soi suit le même parcours que celui de la matière transformée dans la cornue. Telle la lumière alchimique qui puise son origine dans les ténèbres, l’approche de l’inconscient oblige à quitter les repères familiers pour quérir la materia prima de la psyché afin de la transformer. Au fur et à mesure de cet affrontement se produit une modification de la personnalité que Jung nomme « fonction ascendante », et qui invite au changement. Il se crée un nouveau centre au coeur de la psyché, un moi différent qui se dirige vers le Soi. Cette nouvelle naissance psychologique, résultat de la mort des anciennes structures et des vieux schémas suit le processus de la matière et de sa transformation. Les diverses opérations des alchimistes pour parvenir à la Pierre Philosophale, démontrent que le processus de mise en oeuvre doit se dérouler en respectant une chronologie et un rythme. Le moi étant une instance plurielle, son unification ne peut advenir que par l’amorce d’une dynamique intérieure, qui le propulse vers le monde extérieur en mettant en mouvement les pôles contraires. Pour Jung, le Roi et la Reine incarnent l’animus et l’anima. Leur couronnement annonce une réalisation parfaite de la psyché, de l’âme accomplie.
Mais avant de parvenir à cette perfection, les productions de l’imaginaire vont mener le moi au centre de sentiments contradictoires et torturants, la réconciliation ne s’effectuant qu’avec l’apparition de l’Hermaphrodite. Il s’agit de la mise en équilibre par l’intervention de deux inconscients animus et anima et des deux moi de l’homme et de la femme. Au coeur de ce quaternaire doit émerger le Soi, centre et cinquième élément : la quintessence. Dans la quête de ce processus d’individuation, il s’agit de donner au Moi, par la rencontre avec ses partenaires – persona, ombre, anima et animus – les moyens d’atteindre le Soi, principe d’évolution de la vie elle-même. Dès le départ, Jung nous avertit de ne pas négliger l’intérêt de l’alchimie opérative, mais aussi d’en éviter une lecture littérale. Pour lui, les phases du travail de laboratoire représentent une « projection » de contenus psychiques archétypaux. Ainsi, la méthode alchimique, décrite par cette manipulation de la matière, représente-telle de manière métaphorique un procédé intuitif de transformation, où sont en fait figurées les opérations intérieures de l’alchimie spéculative.